Les Ikhwan : une fraternité de combat (2/3), (3/3) (το πρώτο μέρος πιο κάτω στο ιστολόγιο Περί Αδελφών Μουσουλμάνων
Par Yves Brillet
Yves Brillet est ancien élève de l’Ecole Normale Supérieure de Saint Cloud, agrégé d’Anglais et docteur en études anglophones. Sa thèse, sous la direction de Jean- François Gournay (Lille 3), a porté sur L’élaboration de la politique étrangère britannique au Proche et Moyen-Orient à la fin du XIX siècle et au début du XXème.
Il a obtenu la qualification aux fonctions de Maître de Conférence, CNU 11 section, a été membre du Jury du CAPES d’anglais (2004-2007). Il enseigne l’anglais dans les classes post-bac du Lycée Blaringhem à Béthune.
Yves Brillet est ancien élève de l’Ecole Normale Supérieure de Saint Cloud, agrégé d’Anglais et docteur en études anglophones. Sa thèse, sous la direction de Jean- François Gournay (Lille 3), a porté sur L’élaboration de la politique étrangère britannique au Proche et Moyen-Orient à la fin du XIX siècle et au début du XXème.
Il a obtenu la qualification aux fonctions de Maître de Conférence, CNU 11 section, a été membre du Jury du CAPES d’anglais (2004-2007). Il enseigne l’anglais dans les classes post-bac du Lycée Blaringhem à Béthune.
Armée d’Ibn Saoud
prise par Shakespear en 1911 prés de Thaj. In HVF Winstone Captain Shakespear p. 176.
Lire la partie 1
Le mouvement des
Ikhwan constitue un phénomène suffisamment remarquable pour attirer, depuis
Bagdad et Le Caire, l’attention des autorités britanniques au Moyen-Orient. Il
est perçu comme un facteur important dans l’évolution de la situation
intérieure de l’Arabie centrale en tant qu’outil au service d’Ibn Saoud dans
son entreprise de consolidation de son pouvoir et de construction d’un Etat. Il
est aussi appréhendé comme un élément de premier plan dans la stratégie d’Ibn
Saoud de déstabilisation des principautés voisines du Nedjd et d’établissement
de son hégémonie en Arabie centrale [1].
La formation du mouvement
Les Ikhwan
apparaissent comme contemporains de la conquête de la province littorale de
Hasa par les troupes d’Ibn Saoud en 1913. Ils sont la manifestation de ce que
les observateurs de l’époque définissent comme un renouveau wahhabite (Wahabi
revival) caractérisé par un zèle extrême en matière de religion et une
allégeance indiscutée envers Ibn Saoud considéré comme leur Imam [2]. L’Agent
politique à Bahreïn H.R.P. Dickson mit à profit sa rencontre avec l’émir de
Riyad à Hasa en février 1920 pour obtenir, malgré les réticences d’Ibn Saoud,
des informations sur le mouvement des Ikhwan. Selon Dickson, ce dernier est
conscient de l’image négative de la fraternité au-delà des limites du Nedjd, de
l’existence de récits défavorables à leur égard ainsi que de la crainte qu’ils
suscitent dans certains milieux. Enfin, d’après Dickson, Ibn Saoud ne désire
pas apparaitre comme la figure tutélaire du mouvement [3].
La nature du mouvement : origine et doctrine
L’Agent
politique à Bahreïn Dickson souligne la difficulté à déterminer avec précision
la date à laquelle la fraternité est apparue. Il rappelle qu’en 1915, soit 5
ans avant la rédaction de son mémorandum, le terme Ikhwan était pratiquement
inconnu et que les membres de la confrérie, particulièrement nombreux aux
alentours de la colonie de peuplement d’Artawiyyah n’avaient pas participé à la
reconquête de Riyad par Abd el Aziz al Saoud en 1902 [4].
Conscient de la nécessité de prendre le contrôle du mouvement avant d’en
devenir éventuellement l’otage, Ibn Saoud, après la prise de la province de
Hasa, choisit d’utiliser les Ikhwan pour renforcer sa position dans le Nedjd et
asseoir son autorité sur les éléments tribaux susceptibles de contester sa
légitimité. Ainsi en 1916, Ibn Saoud avait-il stipulé que toutes les tribus
devaient lui verser l’impôt (zakat) en échange de sa protection, le
reconnaissant ainsi comme leur suzerain. Dickson souligne que cette situation
de conflit illustrée par la répression à l’encontre des Ajman, avait culminé en
1916-1917. Toujours selon lui, Ibn Saoud était parvenu en 1918 à forcer les
tribus du Nedjd à adopter la doctrine et les mœurs des Ikhwan [5].
L’utilisation du
mouvement par Ibn Saoud lui permet d’accélérer le processus de sédentarisation
des Bédouins. Afin de s’assurer l’obéissance des tribus et de renforcer son
contrôle, Ibn Saoud avait enjoint les autorités religieuses de Riyad de
décréter que les Ikhwan devaient s’établir dans des lieux permanents et
développer une activité agricole. Selon Dickson, cette injonction aurait été
suivie avec enthousiasme et 53 « villes » auraient été ainsi fondées
dans la partie de l’Arabie contrôlée directement par Riyad [6]. L’emplacement
de chacun de ces établissements était sélectionné par Ibn Saoud en personne,
les localisations les plus proches du centre du pouvoir wahhabite étant
réservées aux tribus les plus difficiles à contrôler. Dickson insiste sur le
fait que la stratégie d’Ibn Saoud consiste à scinder les tribus rétives à son
autorité en différentes sections reparties au sein d’autres groupes tribaux
ayant embrassé la doctrine de la confrérie afin de réduire leur pouvoir de
nuisance. Il ajoute que les cheikhs sont regroupés à Ryad auprès de l’émir afin
de renforcer le système de contrôle. En dernier lieu, Dickson indique la
présence dans ces nouvelles localités d’ulémas rattachés à la grande mosquée
chargés de s’assurer de l’efficacité des méthodes d’endoctrinement et de
veiller au respect des règles de l’ikhwanisme.
Le port du
turban blanc constitue le signe distinctif de l’appartenance à l’organisation.
Chaque Frère (Akh) doit faire vivre la fraternité entre les membres et
proclamer le caractère unique et indivisible de Dieu. Il est interdit d’utiliser
le nom du Prophète, qui n’est qu’un homme ayant transmis la Parole, en relation
avec Dieu. Les Ikhwan considèrent les Chiites comme des mécréants parce qu’ils
prononcent le nom de Dieu en association avec une personne (Hassan ou Hussein),
ce qui constitue un crime. L’érection de tombes et de monuments constitue une
forme d’idolâtrie et il est du devoir des frères de les détruire. L’usage du
tabac, la consommation de haschisch, d’alcool ou d’opium est illicite et
formellement proscrit. Un « Akh » se doit de mettre à mort le
coupable s’il est témoin d’un tel agissement. Parmi les autres croyances, les
Ikhwan considèrent que la période actuelle est celle qui précède immédiatement
le retour du Christ parmi les hommes. Dickson souligne que les membres de la
confrérie se comportent avec intolérance et fanatisme devant les éléments
étrangers et refusent de leur rendre le salut (salaam). Concernant la question
des conversions forcées, Ibn Saoud indique à Dickson qu’il n’a jamais donné son
aval à de tels agissements mais qu’il n’est parvenu à y mettre fin qu’en 1916,
après avoir fait fusiller quelques Ikhwan qui n’avaient pas respecté ses
ordres. Ibn Saoud considère que le mouvement est un facteur de civilisation
parmi les Bédouins qui jusque-là n’avaient pas vécu selon les préceptes du Coran [7].
Le gouvernement d’Ibn Saoud et ses relations avec les
Ikhwan
Le territoire
d’Ibn Saoud est divisé en provinces administrées par un émir chargé du maintien
de l’ordre public et de la collecte de l’impôt (zakat). Les villes sont
autogouvernées avec à leur tête leur propre émir responsable de l’ordre public
dans son district [8]. La
Charia est la seule loi appliquée dans les territoires du Nedjd. Elle concerne
l’ensemble des habitants et des sujets d’Ibn Saoud, qu’ils soient sédentaires,
nomades bédouins, membres des Ikhwan. Les cadis nommés dans les principales
agglomérations ont pour mission de veiller à la stricte application des
principes de la Loi et de s’assurer de la bonne exécution de la justice
(mutilation, amputation, décapitation). Riyad ne reconnait pas la validité des
lois tribales. En matière militaire, les forces d’Ibn Saoud sont constituées de
troupes régulières, peu nombreuses, en garnison dans chaque province. Dickson
indique que la troupe cantonnée à Hofouf comprend 800 hommes. Ce sont les
Ikhwan qui constituent l’essentiel de l’armée de Riyad, ils seraient, selon
Dikson qui rapporte chiffres avancés par Ibn Saoud, 300,000 hommes mobilisables
rapidement [9]. Les
revenus d’Ibn Saoud proviennent des impôts (zakat et miri) collectés auprès des
populations sédentaires par les gouverneurs de province. Ibn Saoud lui-même se
charge de la collecte auprès des Bédouins et des Ikhwan sédentarisés. Il fait
le tour des lieux de sédentarisation tous les trois mois pour mieux contrôler
le mouvement. Ibn Saoud, selon Dickson, ne dispose pas en l’état d’un revenu
suffisant pour couvrir ses dépenses et établir un budget. Il dépend en
conséquence des subsides qui lui sont alloués par le gouvernement britannique, bien
que l’organisation financière (système de taxation et collecte de l’impôt) soit
en progrès. Dickson ajoute qu’Ibn Saoud espère une amélioration de la situation
grâce aux revenus générés par les ports d’Ojair et de Jubail.
L’ensemble des
informations obtenues lors de ce séjour à Hasa permet à Dickson d’estimer que
le mouvement des Ikhwan n’est pas aussi négatif qu’on ne le décrit
généralement. Il y voit un effort partagé par le peuple pour se régénérer et
une tentative pour purger l’Islam de ses impuretés. Le mouvement est constitué
principalement par les groupes les moins éduqués de la société et inclut en
majorité les tribus bédouines. Les habitants des villes et les marchands, plus
éduqués, sont majoritairement des wahhabites orthodoxes et si, selon Dickson,
ils n’approuvent pas l’intolérance et le fanatisme des Ikhwan, ils préfèrent
cet état de fait à la situation qui prévalait avant la naissance du mouvement [10].
En quoi la
montée en puissance du phénomène Ikhwan peut-elle avoir une incidence sur la
formulation de la politique de la Grande-Bretagne en Arabie et sur sa relation
avec Ibn Saoud ? Dans une note d’octobre 1920 sur la situation politique
en Arabie, Dickson considère que l’on assiste en Arabie à la formation de deux
groupements antagonistes, l’alliance du nord d’une part, formée par les tribus
Harb, Hutaim, Madain Saleh, Shammar, Dhafir, Zubeir, l’émirat du Koweït regroupées
autour d’Ibn Rashid et l’émirat de Hail, l’alliance du sud d’autre part, autour
du Nedjd, constituée par Idrisi de la province d’Asir, et Oman. Selon Dickson,
le premier groupe dispose d’une plus grande capacité financière, la seconde
d’une force militaire plus importante [11]. Il
ajoute dans cette note que les Ikhwan en forment l’élément essentiel. Une
défaite d’Ibn Saoud aurait un effet désastreux pour le régime semi militaire
instauré par Riyad. En revanche, une victoire d’Ibn Saoud sur ses ennemis
coalisés pourrait s’avérer positive pour les intérêts britanniques. Dickson estime
qu’un pouvoir fort en Arabie centrale entretenant des relations amicales avec
la Grande-Bretagne permettrait à Londres d’imposer plus facilement sa politique
vis-à-vis des Etats du Golfe [12].
H. St John Philby : propos d’un commentateur
engagé
Après la mort
accidentelle du capitaine Shakespear, les contacts directs avec Ibn Saoud ne
reprirent que lorsque fut décidé en octobre 1917 l’envoi d’une mission destinée
à négocier avec Riyad les conditions d’une participation wahhabite aux
opérations menées contre les Turcs et leur allié au Djebel Shammar [13].
Philby accompagné de Cunliffe-Owen avait été précédé à Riyad par le docteur
Harrison, chef de la mission médicale américaine à Bahreïn. Harrison indiquait
dans une note transmise par le Chief Political Officer à Bagdad qu’Ibn Saoud
était occupé à unir tous les Bédouins sous son autorité et que sa force
militaire en dépendait. La capitale du Nedjd était le centre de l’organisation
des Ikhwan et 300 membres de la confrérie y recevaient une instruction
religieuse pour devenir avec le consentement d’Ibn Saoud, des guides spirituels
auprès des différentes tribus. Harrison soulignait que l’interdiction des
guerres intertribales constituait un des points essentiels de l’action d’Ibn
Saoud [14].
L’expérience de
Philby dans le Nedjd lui permet de mettre en avant les aspects les plus
remarquables de l’organisation des Ikhwan. Il divise la population en trois catégories
distinctes : les habitants sédentaires des villes et des agglomérations
qui vivent selon les préceptes du wahhabisme dans lequel ils ont été élevés et
éduqués, les Bédouins dont les habitudes de vie sont teintées de wahhabisme par
proximité avec les centres urbains mais qui ne suivent pas scrupuleusement dans
leur pratique les règles du wahhabisme, et les Ikhwan [15].
Philby souligne que les Ikhwan sont une création d’Ibn Saoud lui-même dans le
but de canaliser l’énergie des nomades et de l’utiliser pour mener à bien son
projet d’établissement d’un Etat établi sur une base religieuse et militaire [16].
Selon Philby, désireux de ne pas répéter les erreurs de ses ancêtres qui
n’avaient pas pu empêcher l’effondrement du premier Etat saoudien au XIXème
siècle, Ibn Saoud fonda à Artawiyyah sur la route reliant Qasim au Koweït, le
premier établissement destiné aux Ikhwan qui allait radicalement transformer la
société bédouine [17].
Philby souligne que le mouvement est une forme radicalisée du wahhabisme dont
l’objectif est de discipliner les relations intertribales et de substituer la
légitimité de la religion à celle de la généalogie. La sédentarisation et la
promotion de l’agriculture ainsi que l’interdiction des guerres intertribales
favorisent la coopération là où n’existait auparavant que la confrontation [18].
A côté des
sections tribales sédentarisées dans les colonies, Ibn Saoud reconnait comme
faisant partie du mouvement les tribus suivantes : Subai, Dawasir, la
section de la tribu Qathan établie dans le Nedjd, une grande partie des Harb,
des Muteir et des Ateibah. Ces éléments respectent les principes de la
confrérie mais conservent leur organisation traditionnelle et ne sont
considérés que comme une force supplétive pas toujours disponible et pas
toujours fiable. Les villages et les villes fournissaient avant le
développement du mouvement des Ikhwan un quota d’hommes destinés au service
actif au prorata de leur population et de l’importance des opérations
envisagées (quota maximum en cas de danger important, minimum en cas
d’expéditions limitées, le recrutement dans ce cas s’effectuant dans les
localités situées à proximité de la zone d’opérations). Avant l’émergence des
Ikhwan, les populations sédentaires constituaient le dispositif majeur des
forces d’Ibn Saoud. Philby fait remarquer qu’Ibn Saoud s’appuie de plus en plus
sur les Ikhwan qui forment avec sa garde personnelle, le « Gom »,
mobilisé pour le service actif [19].
·
Histoire
Publié le 07/05/2020
YVES
BRILLET
Yves Brillet est ancien élève de
l’Ecole Normale Supérieure de Saint Cloud, agrégé d’Anglais et docteur en
études anglophones. Sa thèse, sous la direction de Jean- François Gournay
(Lille 3), a porté sur L’élaboration de la politique étrangère britannique au
Proche et Moyen-Orient à la fin du XIX siècle et au début du XXème.
Il a obtenu la qualification aux fonctions de Maître de Conférence, CNU 11 section, a été membre du Jury du CAPES d’anglais (2004-2007). Il enseigne l’anglais dans les classes post-bac du Lycée Blaringhem à Béthune.
Il a obtenu la qualification aux fonctions de Maître de Conférence, CNU 11 section, a été membre du Jury du CAPES d’anglais (2004-2007). Il enseigne l’anglais dans les classes post-bac du Lycée Blaringhem à Béthune.
Notes
[1] Joseph
Kostiner, On Instruments and their Designers ; The Ikhwan of Nejd and the
Emergence of the Saudi State, Middle Eastern Studies, vol. 21, N°. 3 (Jul.,
1985). pp. 298-323.
[2] David
Cummins, The Mission and the Kingdom-Wahhabi Power Behind the Saudi Throne. IB
Tauris, 2006, pp. 276, pp. 80-81.
[3] Notes on
the Akhwan Movement by H.R.P. Dickson, IOR/L/PS/18/B 340, 1920. Ces Notes constituent au moment de leur rédaction en
mars 1920 un des documents les plus exhaustifs concernant le phénomène des
Ikhwan.
[7] Ibid., p.
4.
[8] Ibid., p.
5.
[9] Ibid.
[10] Ibid., p.
2.
[13] Voir Yves Brillet, Les Missions de St
John Philby auprès d’Ibn Saoud, janvier 1917-octobre 1918, Les Clés du Moyen-Orient, 2017.
[14] A Visit
to Riyadh, by Dr Harrison, Arab Bulletin n°70, Nov. 21, 1917. File 756/1917
pt1-2, Arab Bulletins n°66-114, IOR/L/PS/10/658.
[15] H. St
John B. Philby, The Heart of Arabia, a Record of Travel and Exploration, in 2
volumes, London, Constable and Company Ltd, 1922, vol. 1 pp. 396, p. 298.
[16] Ibid.
[17] Ibid., p.
299.
[18] Joseph
Kostiner, The Making of Saudi Arabia, 1916-1936. From Chieftaincy to
Monarchical State ; Oxford University Press, 1993, pp.260, p. 37.
[19] Ibid., p.
301.
La perception du mouvement des Ikhwan par les autorités britanniques au
Caire, l’analyse de l’Arab Bureau
Le Haut-Commissariat et le Bureau Arabe
inscrivent le mouvement (qualifié également de renouveau wahhabite) dans le
conflit global opposant Ibn Saoud et le Chérif de La Mecque, et plus généralement dans la
rivalité existant entre le Nedjd et le Hedjaz depuis 1806 [1]. Avant même le déclenchement de la Révolte arabe, un rapport rédigé par D.G.
Hogarth pour les services de renseignements de l’Amirauté fait état d’une trêve
entre Hussein et Ibn Saoud mais souligne que si ce dernier renforce son
influence en Arabie, les tensions générées par les craintes d’Hussein vis-à-vis
de son rival déboucheront sur un conflit ouvert. Hogarth indique que le Chérif
n’admettra jamais la présence de Wahhabites au Hedjaz en raison de leurs
exactions contre les Lieux saints un siècle auparavant. Il ajoute que le
wahhabisme est un mouvement destructeur, contrastant ainsi avec l’Islam
tolérant et accommodant de La Mecque et de Damas [2]. Tout en admettant
que les préventions d’Ibn Saoud contre le Chérif n’étaient pas dénuées de
fondement, comme l’attestaient les manœuvres d’Hussein en 1910 pour placer les
Ateibah sous son autorité, Hogarth nie à Ibn Saoud, qu’il décrit comme le chef
d’un mouvement sectaire et fanatique, la légitimité à représenter et à parler
au nom de l’Islam [3].
L’Arab Bulletin rédigé par l’Arab
Bureau à l’intention du Foreign Office, du War Office, de l’India Office, de
l’Amirauté et du Government of India donne régulièrement des informations sur
le mouvement des Ikhwan et attire l’attention sur la dangerosité potentielle de
la confrérie [4]. Le numéro 73
publie le 16 décembre 1917 une note évoquant la visite dans le Nedjd du
Résident politique au Koweït et sa rencontre avec la tribu des Muteir. Le
bulletin mentionne leur appartenance à la confrérie sous l’autorité de leur
cheikh Faisal ad Dawich ainsi que la fondation d’une colonie regroupant 35.000
hommes près des puits d’Artawiyyah. La note décrit l’ikhwanisme comme la
manifestation d’un renouveau wahhabite de plus en plus perceptible, susceptible
d’acquérir une grande importance et vu avec inquiétude depuis le Hedjaz [5]. Hamilton qualifie
lui aussi le mouvement de fanatique et de sectaire et insiste sur son influence
grandissante dans les localités traversées depuis son départ du Koweït [6]. L’Arab Bulletin met
en garde contre la dimension fanatique et belliqueuse du mouvement wahhabite en
général et l’expansion des Ikhwan en particulier. Une note intitulée Abdullah
and the Akhwan publiée le 17 décembre 1917 et signée T. E. Lawrence résume une conversation
avec Feisal dans laquelle ce dernier expose la position chérifienne vis-à-vis
du mouvement. Feisal indique que les Ikhwan tiennent le jihad comme principe
fondamental et reconnaissent l’émir de Riyad comme leur chef suprême tant
religieux que temporel. Ibn Saoud paie le salaire de ses prédicateurs dépêchés
dans toute la péninsule pour promouvoir la doctrine. Feisal estime que 80% des
Bédouins du Nedjd ont rejoint la confrérie qui se développe depuis Taif en
direction du Yémen. Les nouveaux convertis sont totalement fanatisés et
entièrement sous l’influence de Riyad. Dans cette note, Feisal met également en
garde les autorités britanniques contre les visées hégémoniques d’Ibn Saoud qui
attend la conversion en masse des Shammar pour s’attaquer à Hail. Il estime
qu’Ibn Saoud, lorsqu’il considérera que la situation est propice, lancera ses
Bédouins contre les populations sédentaires de l’Arabie (Qasim, Hail, Hedjaz).
Dans cette perspective, le rôle de son frère Abdallah est de faire obstacle à
l’expansion des Ikhwan en gagnant les Shammar à la cause chérifienne ainsi que
les Ateibah sans l’aide desquels Ibn Saoud est dans l’incapacité de prendre le
contrôle du Hedjaz. L’effort chérifien porte également sur la province de Qasim [7].
De son côté, lors d’une conversation avec
Kinahan Cornwallis du Bureau Arabe et C. E. Wilson en poste à Djeddah, Abdallah
accuse Ibn Saoud de fomenter la discorde parmi les tribus du Hedjaz,
particulièrement celles dont les zones de nomadisation sont situées de part et
d’autre de la limite entre le Nedjd et le Hedjaz. Selon Abdallah, Ibn Saoud
tente d’acheter les tribus séjournant une partie de l’année dans les territoires
sous son autorité ; il ajoute qu’en l’absence de réaction de la part de la
Grande-Bretagne, Hussein serait conduit à régler le problème par lui-même [8]. L’Arab Bureau
porte également attention aux convertis. T.E. Lawrence annonce en effet la
conversion de nombreux cheikhs des Ateibah et des Muteir depuis 1914. Il
indique que la plupart des Muteir ayant rejoint les Ikhwan s’installent à
Artawiyyah qui est appelé à devenir le centre névralgique du mouvement.
D’autres villages (Dukka, Suman, Dahana) regroupent des sections des Harb et
des Ateibah [9]. Le Bulletin n°100
du 20 août 1918 conclut que l’indéniable développement de la confrérie parmi
les tribus les plus rétives à son autorité peut légitimement inquiéter Hussein [10].
Les réactions de Philby
Suite à sa mission auprès d’Ibn Saoud, la
rédaction de son rapport permet à Philby de répondre aux remarques négatives
contenues dans l’Arab Bulletin. Il réfute les approximations d’Hamilton
concernant la population d’Artawiyyah. Philby l’estime à 12.000 habitants et
non 35.000. A son arrivée à Djeddah puis au Caire, Philby s’étonne de l’écho
donné au rapport rédigé par Hamilton, dénonçant les calomnies, les informations
tronquées, et la propagande hostile à l’égard des Ikhwan dans les cercles du
pouvoir chérifien ainsi que dans les antichambres du Bureau Arabe [11]. Il critique la note de T. E. Lawrence (Arab Bulletin n° 74)
et met en cause les cercles proches d’Hussein qui exagèrent le danger
représenté par le renouveau wahhabite. Selon Philby, la menace est imaginaire
et il ne concède qu’un seul incident entre les Ikhwan de GhatGhat et une
sous-section des Ateibah. Il soutient que cet incident est mis à profit par le
Chérif Hussein pour attirer l’attention sur la nécessité de freiner le
développement du mouvement et pour tenter de convaincre le gouvernement
britannique de ne rien faire qui puisse renforcer le potentiel militaire d’Ibn
Saoud.
Philby soutient qu’une analyse impartiale de la
situation en Arabie le conforte dans sa conviction que la notion de péril
wahhabite est une invention d’esprits partisans. Il est persuadé qu’Ibn Saoud
contrôle efficacement le mouvement wahhabite et que la tactique d’Hussein
consiste à pousser Ibn Saoud à agir contre lui pour forcer la main de Londres
et obliger la Grande-Bretagne à le soutenir contre son rival [12]. Philby explique la genèse du mouvement des Ikhwan par le fait qu’à la
différence du régime de Hail reposant sur une unité tribale entre la famille
régnante des Rashid et les Shammar, le pouvoir des Saoud est isolé dans le
Nedjd au milieu de populations tribales désunies, rivales et n’entretenant pas
de liens familiaux avec les Saoud. Confronté à cette difficulté, Ibn Saoud,
d’après Philby, organisa le mouvement des Ikhwan selon les principes
suivant :
1-l’organisation concerne essentiellement les Bédouins. Les populations sédentaires, considérées comme strictement wahhabites, ne sont concernées que de manière indirecte et ne requièrent pas d’attention particulière.
2-Les mutawwa (prédicateurs), sont choisis parmi les ulémas pour instruire les Bédouins selon les principes édictés par le Coran et combattre les coutumes bédouines.
3-La destruction /dislocation des caractéristiques essentielles de la vie bédouine se fait grâce à la sédentarisation dans des lieux sélectionnés par Ibn Saoud. Cela rend possible selon Philby de substituer l’appartenance à la fraternité des Ikhwan au lien d’appartenance tribale. Il donne comme exemple les Muteir qui conservent le lien tribal les reliant aux sections non converties de la tribu mais en jouissent du lien « fraternel » les reliant à des tribus converties et qui auparavant leur étaient hostiles. Cette stratégie permet à Ibn Saoud d’édifier son pouvoir politique en s’appuyant à la fois sur les Ikhwan et les populations sédentaires. Cette nouvelle organisation facilite l’interdiction des raids intertribaux et permet de canaliser l’énergie guerrière des nomades. Ils forment ainsi un noyau armé au service de Riyad. Pour résumer, Philby indique que l’objectif d’Ibn Saoud est de favoriser le développement du mouvement pour renforcer sa puissance militaire et pour réduire la faiblesse inhérente à l’Etat et à l’armée bédouine. A long terme, Ibn Saoud entend se prémunir contre ses ennemis et absorber l’émirat de Hail. Pour le reste, il sait qu’il ne peut aller contre les décisions et les attentes de la Grande-Bretagne [13].
1-l’organisation concerne essentiellement les Bédouins. Les populations sédentaires, considérées comme strictement wahhabites, ne sont concernées que de manière indirecte et ne requièrent pas d’attention particulière.
2-Les mutawwa (prédicateurs), sont choisis parmi les ulémas pour instruire les Bédouins selon les principes édictés par le Coran et combattre les coutumes bédouines.
3-La destruction /dislocation des caractéristiques essentielles de la vie bédouine se fait grâce à la sédentarisation dans des lieux sélectionnés par Ibn Saoud. Cela rend possible selon Philby de substituer l’appartenance à la fraternité des Ikhwan au lien d’appartenance tribale. Il donne comme exemple les Muteir qui conservent le lien tribal les reliant aux sections non converties de la tribu mais en jouissent du lien « fraternel » les reliant à des tribus converties et qui auparavant leur étaient hostiles. Cette stratégie permet à Ibn Saoud d’édifier son pouvoir politique en s’appuyant à la fois sur les Ikhwan et les populations sédentaires. Cette nouvelle organisation facilite l’interdiction des raids intertribaux et permet de canaliser l’énergie guerrière des nomades. Ils forment ainsi un noyau armé au service de Riyad. Pour résumer, Philby indique que l’objectif d’Ibn Saoud est de favoriser le développement du mouvement pour renforcer sa puissance militaire et pour réduire la faiblesse inhérente à l’Etat et à l’armée bédouine. A long terme, Ibn Saoud entend se prémunir contre ses ennemis et absorber l’émirat de Hail. Pour le reste, il sait qu’il ne peut aller contre les décisions et les attentes de la Grande-Bretagne [13].
Méfiance des autorités britanniques en Egypte
La méfiance des autorités britanniques au Caire
continue de s’exprimer dans les colonnes de l’Arab Bulletin. Le 18
octobre 1918, un article intitulé The Ikhwan and the Wahabis décrit
le mouvement comme ayant pris le contrôle de la société wahhabite. La note met
l’accent sur l’existence de réunions et de délibérations secrètes ainsi que sur
des innovations concernant les lois sur le mariage associées à un laxisme
croissant en matière de sexualité. La note indique également que les Ikhwan ne
participent pas au pèlerinage (haj) et considèrent que les Lieux saints
sont pollués par la présence du Chérif. L’auteur de l’article indique que les
Bédouins reconnaissent Ibn Saoud comme le chef de leur confrérie et que l’appui
apporté à l’immoralité des adhérents a contribué à l’expansion du mouvement.
Politiquement, l’auteur de la note concède qu’Ibn Saoud a renforcé sa position
en interdisant le « ghazzu » (raids intertribaux). La note insiste
également sur le fait que les Ikhwan contrôlés par Ibn Saoud constituent une
menace pour l’orthodoxie mecquoise et que les relations entre wahhabites et
chérifiens sont de plus en plus conflictuelles. Pour les Ikhwan, Hussein est un
mécréant et tout homme l’ayant servi peut être victime d’ostracisme familial et
social. Ibn Saoud capitalise sur les difficultés rencontrées par Hussein au
Hedjaz et en raison du discrédit dont il est frappé. Les Ateibah, Harb et Ageil
l’ont abandonné. La note cite une lettre de Hussein du 18 août dans laquelle il
considère que le gouvernement britannique doit absolument obliger Ibn Saoud à
dissoudre et disperser les Ikhwan qui constituent une menace pour les intérêts
arabes [14].
Philby répondit point par point en janvier
1919. Il insiste sur le fait que les Ikhwan ne contrôlent pas la société
wahhabite mais sont les instruments aux mains des principaux leaders du
mouvement qui reconnaissent l’autorité supérieure d’Ibn Saoud. Les réunions
auxquelles assistent les membres de la confrérie ne sont pas secrètes et sont
consacrées à la lecture du Coran, des Hadith et des Tafsir (exégèses du Coran).
Au cours de ces réunions, Ibn Saoud évoque aussi les opérations contre Hail
ainsi que les relations avec le Hedjaz, dans le but selon Philby de calmer
l’ardeur conquérante de ses troupes. Le terme Ikhwan définit d’après Philby les
Bédouins qui ont rejoint le cercle intérieur du wahhabisme. Concernant les
accusations d’immoralité, il indique qu’ils respectent les prescriptions du
Coran en matière de mariage et que le laxisme sexuel est condamné. En dernier
lieu, les Ikhwan participent au pèlerinage et respectent le caractère sacré de
la Maison de Dieu (Beit Allah). Philby considère qu’Ibn Saoud tient fermement
les rênes du mouvement, et que contrairement à ce qui avait été écrit, il
perçoit l’impôt (zakat) auprès des tribus converties [15].
La menace des Ikhwan sur le Hedjaz
Au cours de l’année 1918, la crainte de voir
les Ikhwan envahir le Hedjaz se fait de plus en plus pressante. En juillet
1918, Wingate évoque les craintes d’Hussein de ne pouvoir s’opposer à
l’expansion du mouvement wahhabite [16]. L’instabilité du régime chérifien et la faiblesse du contrôle exercé
par Hussein sur les tribus bédouines, plus particulièrement celles installées
dans la zone de contact avec le Nedjd rendent plausible une attaque
généralisée. Wingate fait part à Londres de l’augmentation du prosélytisme
wahhabite et du renforcement de l’influence des Ikhwan en raison de l’arrêt du
versement par Hussein des subsides aux Bédouins [17]. Le 6 décembre 1918, Wingate mentionne un pillage organisé par les
Ikhwan à 45 milles de Taif. Il transmet la demande d’Hussein d’intimer à Ibn
Saoud l’ordre de procéder à la dispersion des colonies d’Ikhwan à Hentry,
GhatGhat et Artawiyyah sous les 35 jours. En outre, les Ateibah devraient se
voir interdits d’entrer en communication avec ces localités. Wingate indique
que le colonel C.E. Wilson à Djeddah estime lui aussi que l’activité des Ikhwan
s’intensifie et qu’Ibn Saoud est responsable de ce regain d’agitation. Wilson considère
qu’il serait opportun d’ordonner à Ibn Saoud de retirer les Ikhwan de la zone
de Khurma [18]. Il estime que les craintes d’Hussein concernant les objectifs
militaires d’Ibn Saoud sont fondées [19].
Quelques jours plus tard, Wingate attire l’attention
sur la menace que les Ikhwan sous le commandement de Sultan bin Bijad font
peser sur La Mecque. Il demande que le Foreign Office agisse pour demander le
retrait de toutes les forces des Ikhwan présentes à l’ouest de Khurma. Wingate
prévient que les Ikhwan ont repris l’offensive et qu’ils constituent une menace
directe pour La Mecque. Pour lui, il est impensable d’accepter la présence des
Ikhwan à proximité des villes saintes. Il demande qu’Ibn Saoud soit mis en
garde immédiatement et averti que le non-retrait de ses forces l’exposerait à
des mesures de rétorsion de la part des autorités britanniques ainsi qu’à la
suspension du versement de l’aide financière [20]. Dans sa réponse, le Secrétaire d’Etat pour l’Inde indique que si les
propos de Wingate concernant l’offensive des Ikhwan sont confirmés, l’India
Office se verra dans l’obligation de reconsidérer sa position à l’égard d’Ibn
Saoud [21]. Le 18 décembre, Wingate mentionne la réception du rapport de Philby
sur sa mission en Arabie, rapport qualifié d’excellent. Il indique en outre
qu’Hussein estime que si rien ne vient modifier l’état des choses, l’influence
des Ikhwan au Hedjaz deviendra prépondérante et rendra sa situation intenable [22]. Wingate n’est pas le seul à attirer l’attention sur l’influence
grandissante des Ikhwan au Hedjaz. Dans un télégramme à Bagdad, il fait
référence à une conversation rapportée par C.E. Wilson avec un émissaire d’Ibn
Rashid qui confirme les progrès du mouvement wahhabite, en d’autres termes les
Ikhwan, ainsi que le ralliement d’une partie importante des tribus Muteir et
Ateibah. Il indique que selon son informateur, l’objectif d’Ibn Saoud est de
reconstituer le premier Etat des Saoud et de conquérir La Mecque [23]. Wilson ajoute que Riyad doit être fermement invité à retirer ses
hommes qui constituent une réelle menace pour la sécurité du Hedjaz. Selon lui,
Ibn Saoud doit être informé qu’une concentration de forces hostiles à proximité
de La Mecque et de Médine ne sera pas tolérée en raison des engagements pris
par la Grande-Bretagne d’assurer la sécurité et la stabilité du royaume [24].
Le Caire s’inquiète de l’influence grandissante
et de l’intensification du prosélytisme des Ikhwan. Le Haut-Commissariat
informe Londres que les chefs de la tribu des Ateibah ont informé Hussein
qu’ils ne pourront tenir longtemps leurs positions s’ils n’obtiennent pas un
soutien actif. Cheetham mentionne la présence de 8 émissaires d’Ibn Saoud dans
la province d’Asir. Hogarth de l’Arab Bureau se déclare favorable à une
intervention sur le terrain pour contraindre Ibn Saoud à contrôler les Ikhwan
et restaurer le prestige d’Hussein en Arabie centrale [25].
Notes
[1] Joseph Kostiner, p. 16.
[2] Arabian Report, Week
ending Feb. 16th 1916, File 705/1916/pt.1-2, IOR/L/PS/10/586.
[3] Arabian Report, 12th
March 1916.
[4] Bruce Westgate, The
Arab Bureau. British Policy in the Middle East, 1916-1920, The Pennsylvania
State University, 1992, pp.231, p.104.
[5] Arab Bulletin
n° 73, 16th Dec. 1917.
[6] Arab Bulletin n°78,
11th Feb. 1918.
[7] Note on Conversations
with Emir Abdullah by Col. Wilson and Major Cornwallis at Abu Markla, Hejaz,
during Dec. 1917, Cornwallis, Major, Cairo, Director Arab Bureau, 10th Jan.
1918, File 2182/1913/7, IOR/L/PS/10/389. Voir aussi Arab Bulletin n°74, 24th
Dec. 1917.
[8] Arab Bulletin,
n° 76, 10th Jan. 1918.
[9] Arab Bulletin n°77,
17th Jan. 1918.
[10] Arab Bulletin
n° 100, 20th Aug. 1918.
[11] H. St John B. Philby,
Arabia of the Wahabis, London, 1928, pp.422, p.352/353.
[12] Report on Najd Mission,
1917-1918, pp.19, IOR/R/15/1/747, § 14.
[13] Ibid., p. 30.
[14] Arab Bulletin
n° 100, 18th Oct. 1918. File 756/1917 pt.1-2, Arab Bulletins n°66-114.
[15] Ibid., Arab Bulletin
n° 108, 11th Jan. 1919.
[16] Wingate to F.O.,
n° 1150, 30th Jul. 1918, File 2182/1913/7, IOR/L/PS/10/389.
[17] Tel. P. from Wingate,
Cairo to F.O., repeated India and Baghdad, n° 1765, 26th Nov 1918, File n° E.8,
vol IV, Bin Saud, IOR/R/15/2/34.
[18] Sur
l’affaire de Khurma, voir Yves Brillet, La crise de Khurma et
la gestion par la Grande-Bretagne du conflit entre le Nedjd et le Hedjaz, Les
clés du Moyen-Orient, 2019.
[19] Tel. from Wingate,
Cairo to F.O., n°1827, 6th Dec. 1918. Voir aussi Cab/24/145/38, Eastern Report
n°XCVIII, including Arab Report n.s. n°CXXV, 12th Dec. 1918.
[20] Tel. from Wingate,
Cairo to F.O., n°1857, 11th Dec. 1918.
[21] Tel. P. from Secretary
of State for India, London to Political, Baghdad, repeated Foreign, Delhi, 13th
Dec. 1918.
[22] Tel. from Wingate,
Cairo to F.O. n°1954, 27th Dec. 1918.
[23] Tel. X from Wingate,
Cairo to F.O., n°179, 7th Jan. 1919.
[24] Cab/24/145/42, Eastern
Report n°CII, 9th Jan. 1919.
[25] Tel from Sir Milne Cheetham
to F.O., 17th Feb. 1919, File 2182/1913/9, IOR/L/PS/10/390.
Le mouvement des Ikhwan vu depuis le Golfe Persique et la Mésopotamie
Les autorités britanniques dans le Golfe témoignent
également du développement du mouvement, en parallèle avec l’accroissement des
tensions avec Ibn Rashid et Hussein.
L’Agent politique à Bahreïn rend compte de la situation dans le Nedjd en
insistant sur le fait que les Ikhwan restent sous le contrôle d’Ibn Saoud bien que
les relations qu’il entretient avec les autorités britanniques ne remportent
pas l’adhésion de tous les membres de la fraternité. Il rapporte également que
bien que des membres de la confrérie ont attaqué des localités au Hedjaz et que
seules les villes de La Mecque, de Médine et de Taif restent sous le contrôle
des forces chérifiennes et sont protégées par leur statut religieux, Ibn Saoud
semble déterminé à ne pas bouleverser le statu quo et a interdit à ses troupes
de poursuivre leurs attaques. L’Agent à Bahreïn estime également que le
mouvement est devenu un facteur politique décisif en Arabie centrale et que 80%
des Bédouins, depuis le wadi Nejran jusque Khurma, se sont convertis. Toutes
les tribus font allégeance à Riyad et leurs représentants y reçoivent une
instruction religieuse et une aide matérielle. En raison de leur fanatisme
religieux, Ibn Saoud pourrait sans difficulté déclencher une conflagration
généralisée dans la péninsule [1].
Mais l’influence grandissante des Ikhwan constitue
cependant une menace pour l’autorité d’Ibn Saoud. Pour l’Agent politique au
Koweït, même si le mouvement n’entretient pas pour l’instant d’ambition
politique et n’a pas d’objectif propre, il pourrait outrepasser les consignes
d’Ibn Saoud et s’en prendre directement au Chérif, ce qui contraindrait la
Grande-Bretagne à intervenir. Un visiteur à Riyad (il s’agit du Dr Harrison de
la mission médicale américaine appelé pour soigner des membres de la famille al
Saoud) à la même période fait état de la montée de l’intolérance et de
l’agressivité à l’égard des étrangers [2].
L’agent politique à Bahreïn est en conséquence prié d’informer Ibn Saoud que le
développement du militantisme wahhabite constitue pour les autorités
britanniques une menace pour la sécurité du Hedjaz qu’elles sont dans l’obligation
de protéger contre toute agression [3].
Pour ce qui concerne la Mésopotamie et plus
particulièrement la province de Bassora, les services du gouverneur militaire
transmettent au Commissariat Civil à Bagdad une note concernant la situation
dans la zone frontalière entre l’Irak et le Nedjd ainsi qu’à Hail. Le
gouverneur militaire souligne qu’Ibn Saoud rencontre des difficultés dans ses
rapports avec les Ikhwan et ne pourra pas continuer de les contrôler. Il
insiste sur l’éventualité d’un rapprochement avec Ibn Rashid pour
contrebalancer la force du mouvement en cas de nécessité. Dans cette note, le
capitaine Rabino, officier politique adjoint à Bassora, après avoir rappelé en
introduction les données de base sur l’origine et l’organisation du mouvement
ainsi que sa diffusion auprès des principales tribus sous l’autorité d’Ibn
Saoud, indique qu’Ibn Rashid est parvenu à stopper la progression de
l’ikhwanisme auprès des Shammar mais que son influence se fait progressivement
ressentir au Koweït et à Zubair. Il estime que Riyad n’est plus en mesure de
contrôler efficacement les Ikhwan et qu’en cas de conflit avec l’organisation,
Ibn Saoud perdra l’avantage et sera forcé de se soumettre. Selon les émissaires
d’Ibn Rashid, Hail est protégé d’une attaque grâce à la garantie fournie par le
Chérif qui constitue la cible principale de la fraternité. Commentant la montée
du fanatisme au sein de la tribu des Muteir, l’auteur de la note souligne que
Faisal ad Dawish invite tous les non-convertis à le rejoindre sous peine d’être
exécutés. En Mésopotamie, Rabino souligne la crainte suscitée par les Ikhwan au
sein des Dhafir et des tribus résidant dans la zone des marais (Marsh Arabs).
Le Cheikh de Zubair estime à cet égard que des mesures devraient être prises
pour endiguer la progression du mouvement. Dans cette perspective, Ibn Rashid
apparait comme l’homme susceptible de fédérer les tribus opposées aux Ikhwan
pour constituer une zone tampon entre ces derniers et l’Irak [4].
La note est accompagnée d’un commentaire de l’Officier
en résidence à Bassora dans lequel il indique que si les Ikhwan sont devenus
dominants dans le Nedjd, Hail et les villages du Djebel Shammar sont également
touchés par le phénomène, bien que les éléments tribaux y semblent moins
fanatisés. Il rappelle que tous les observateurs s’accordent sur la probabilité
d’un « renouveau wahhabite » exacerbé par la présence d’une puissance
chrétienne d’occupation en Irak. Il souligne comme Rabino que le mouvement,
encouragé par l’attitude bienveillante du cheikh, gagne en influence au Koweït
et que Faisal ad Dawich apparait comme un rival potentiel d’Ibn Saoud [5].
L’expansion du mouvement est corroborée par l’Agent Politique à Bahreïn qui
rapporte le 6 juillet 1919 les propos d’un marchand du Nedjd indiquant que le
mouvement gagne Hail ainsi que les provinces d’Asir, du Yémen, et certaines
parties du Hedjaz. Leur présence serait attestée à La Mecque où ils
comploteraient contre Hussein et ils seraient prêts à rejoindre Ibn Saoud qui
reçoit des émissaires en provenance de toute la péninsule [6].
Mise au point du Caire concernant la nécessité de bloquer le mouvement
des Ikhwan dans le Hedjaz. Note du capitaine Garland (E.E.F.) du 10 juillet
1919
Garland rappelle tout d’abord que les Ikhwan sont une
création récente et qu’ils ne diffèrent pas fondamentalement des Wahhabites.
Ils sont seulement beaucoup plus fanatiques. Pour l’ensemble des observateurs,
plus que les croyances elles-mêmes, la caractéristique la plus marquante du
mouvement est la violence exercée par ses adhérents. Garland estime indubitable
que les Bédouins convertis et fanatisés utilisent la terreur pour forcer les
conversions et que ceux qui refusent ou qui sont considérés comme pécheurs sont
mis à mort. Il ajoute que sur le champ de bataille, les Ikhwan ne font pas de
prisonniers [7].
Garland reprend l’idée selon laquelle Ibn Saoud n’a pas eu de responsabilité
directe dans la création du mouvement des Ikhwan mais qu’il n’a rien fait pour
en freiner le développement, comme en témoigne la proximité géographique entre
les principaux foyers de l’ikhwanisme et Riyad. Il remarque, comme d’autres
avant lui, qu’il s’agit d’une version fanatisée du wahhabisme dont Ibn Saoud a
pris le contrôle et qu’il utilise à ses propres fins. Il estime que le
mouvement s’est répandu dans toute l’Arabie et ne disparaitra pas avec la
conclusion de l’affaire de Khurma. Les Ikhwan et
leur doctrine sont détestés de tous les voisins d’Ibn Saoud, en particulier Hussein.
Après avoir fait la synthèse des événements survenus
au cours des crises de Khurma et Turabah, Garland constate que les forces
chérifiennes ont chaque fois été défaites par les forces d’Ibn Saoud. Il pose
la question des mesures à prendre pour mettre en place un système de défense
efficace des villes de Médine et de La Mecque, se demandant s’il est possible
de compter sur la tribu des Harb pour protéger ces deux localités. Une défense
aérienne de Taif et de La Mecque ne peut être envisagée que de manière
temporaire et les opérations des Ikhwan reprendront dès que l’aviation aura été
retirée. Il estime que les forces chérifiennes ne sont pas en état de s’opposer
aux forces armées de Riyad et que la défense du Hedjaz incombera de facto à la
Grande-Bretagne. Pour Garland, il sera donc nécessaire de maintenir une force
armée commandée par des officiers entrainés et compétents afin de contenir les
Ikhwan et d’encourager une alliance entre Hussein et Ibn Rashid. L’émir de
Hail, souligne-t-il, a toujours été hostile au wahhabisme militant et peut
mobiliser un contingent important dans le centre de la péninsule capable de
menacer les lignes de communications d’Ibn Saoud dans le Nedjd. Selon Garland,
cela implique l’octroi d’un soutien financier à Ibn Rashid. Il sera aussi
opportun de faire pression sur Ibn Saoud à partir de la province littorale de
Hasa, ceci pouvant s’avérer plus productif qu’un soutien armé à Hussein. Il
conclut enfin que pour freiner efficacement la progression du mouvement des
Ikhwan, il serait judicieux d’inclure dans les futurs traités avec les
principautés arabes une clause leur permettant de renvoyer les émissaires d’Ibn
Saoud présents sur leurs territoires [8].
L’évolution du mouvement vue depuis Bahreïn, Bagdad et le Koweït :
1920
Les notes confidentielles de l’Agent politique à
Bahreïn sont plus positives et insistent sur la popularité croissante du
mouvement dans l’ensemble de la péninsule, depuis le Qatar, Hasa, les Etats
riverains du Golfe jusqu’au Yémen et la province d’Asir. Les rapports indiquent
que les conversions sont de plus en plus nombreuses et que les Ikhwan
apparaissent comme autant d’éléments purificateurs de l’Islam. Dickson souligne
l’enthousiasme des habitants du Nedjd et la popularité dont bénéficie Ibn
Saoud. Il estime que le mouvement est devenu clairement politique, que l’unité
du Nejd et l’avenir de la fraternité sont liés et qu’Ibn Saoud n’a aucunement
l’intention de laisser les Ikhwan échapper à son contrôle. Dickson considère
que dans la compétition l’opposant à Hussein, l’alliance avec les membres de la
fraternité lui donne un avantage substantiel [9].
Le 22 janvier 1920, Dickson demande l’autorisation de
se rendre à Hasa pour rencontrer Ibn Saoud et profiter de l’occasion pour
obtenir des informations complémentaires sur l’évolution de la situation dans
le Nedjd [10]. Au cours de
ses conversations avec Ibn Saoud, il a pu rassembler les éléments
suivants : l’émir de Riyad exprimait son accord avec les croyances et les
pratiques religieuses des Ikhwan et se présentait comme le guide du mouvement
dont les principes essentiels reposaient sur la reconnaissance du dieu unique
et la fraternité de tous les Musulmans. Ibn Saoud estime que le mouvement a un
impact bénéfique pour les Bédouins et leur mode de vie sur le plan religieux et
en matière d’éducation grâce à la construction d’écoles dans les centres de
sédentarisation déterminés par lui. Une fois cette sédentarisation effectuée,
Ibn Saoud fait venir à Riyad les chefs de tribus qui le suivent dans ses
déplacements et forment ainsi sa garde personnelle. Il confie à Dickson qu’il
contrôle désormais tous les Bédouins d’Arabie à l’exception des Dhafir et qu’il
reçoit des émissaires en provenance du Yémen, de l’Hadramaout, d’Oman ainsi que
de la tribu des Shammar qui demandent à le rejoindre et proposent de lui verser
le zakat [11]. Dickson
informe Bagdad que le phénomène des Ikhwan, qui gagne en puissance et en
influence n’est pas aussi négatif qu’on le présente fréquemment, mais qu’il
peut se transformer en un nouveau mahdisme s’il est mal dirigé, et qu’Ibn Saoud
l’utilise habilement à des fins politiques. Il note que la présence à Hofouf de
représentants de tribus périphériques est significative de l’attraction
qu’exerce l’émir de Riyad [12].
Le Haut-commissaire civil à Bagdad informe l’India
Office de la teneur des rapports de Dickson en insistant sur le fait que de
nouvelles tribus se convertissent et reconnaissent l’autorité d’Ibn Saoud.
Parmi les derniers convertis, Bagdad fait état des Ajman. Bagdad note également
que le mouvement est considéré avec bienveillance à Bahreïn et qu’Ibn Saoud
reçoit des messages des principautés du littoral du Golfe désireuses de se
rapprocher de lui. Le Haut-commissariat remarque également que le cheikh du
Koweït fait pression sur le Cheikh Isa de Bahreïn afin de contrer l’influence
d’Ibn Saoud. D’autre part, la prise éventuelle de La Mecque est évoquée à
Bahreïn avec complaisance, ainsi que dans les principautés du Golfe et en
Mésopotamie [13].
Les craintes exprimées face à la menace des Ikhwan au Hedjaz
L’Agent politique à Djeddah, le lieutenant-colonel
Vickery rapporte le 6 mars 1920 une conversation avec le chérif Abdallah au
cours de laquelle ce dernier critique et met en doute le mémoire de Dickson sur
le mouvement des Ikhwan [14]. Le compte
rendu de cette conversation est transmis au Foreign Office par Allenby le
20 mars. Allenby insiste sur la nécessité de parvenir à un accord entre Hussein
et Ibn Saoud avant le commencement du pèlerinage afin d’éviter que la tension
ne conduise à un conflit ouvert entre les deux protagonistes [15]. Allenby
critique les avis de Dickson à Bahreïn et d’A.T. Wilson, Civil Commissioner à
Bagdad sur le mouvement des Ikhwan. Il conteste les conclusions des autorités
dans le Golfe et à Bagdad sur la manière dont serait perçue une prise de La
Mecque par les forces d’Ibn Saoud. Il soutient que cela constituerait un
véritable revers pour la Grande-Bretagne et que le gouvernement britannique a
contracté des obligations envers le gouvernement chérifien. Allenby considère
aussi qu’il serait très dangereux de se montrer complaisant envers un mouvement
qui remettrait fondamentalement en cause l’équilibre des forces en Arabie et
laisserait la péninsule aux mains d’une secte de fanatiques [16].
Concernant les analyses de Dickson, Vickery estime
qu’il est impossible d’accepter l’idée selon laquelle les Ikhwan pourraient se
montrer bien disposés envers la Grande-Bretagne. Depuis Djeddah, il considère
que le mouvement représente un danger, plus particulièrement dans la zone
frontière entre le Nedjd et le Hedjaz. Ibn Saoud peut se présenter comme le
réformateur de l’Islam mais si la purification des pratiques se fait par la
violence, la position de la Grande-Bretagne dans la péninsule en sera
fragilisée. Le gouvernement doit donc faire face à une situation difficile et
doit éviter que le royaume chérifien ne tombe sous les assauts des Ikhwan.
Conclusion
L’année 1920 constitue un moment déterminant dans
l’évolution de la situation en Arabie centrale. Comme les pages qui précèdent
ont tenté de le montrer, Ibn Saoud a illustré sa capacité à prendre le contrôle
du royaume du Hedjaz, ce que reconnaissent les autorités britanniques au Caire
qui continuent cependant à apporter leur soutien à Hussein et attirent
l’attention du Foreign Office et de l’India Office sur le danger que font peser
les Ikhwan sur l’équilibre des forces dans la péninsule. La suspension des opérations dans
le Hedjaz acceptée par Ibn Saoud dans un souci de temporisation va le conduire
à utiliser la force des Ikhwan pour construire une stratégie alternative visant
à affaiblir le pouvoir chérifien en neutralisant les deux principaux alliés
d’Hussein, l’émirat de Hail et le Koweït.
Notes
[1] File
n° E-8, vol.IV, from Political Bahrein to Political, Baghdad, n°41-C, 25th
Feb. 1919.
[2] Political
Agency, Koweit, Diary Week ending 31st Jan. 1919.
[3] Political,
Baghdad to Political, Bahrein, n°3322, 23rd Mar. 1919.
[4] Office
of the Military Governor and Political Officer to the Civil Commissioner,
Baghdad, n°4002, 7th May 1919.
[5] Ibid.,
A.S. Meek, Military Governor and Political Officer, Basrah, 25th May 1919.voir
aussi Political Agency, Koweit to Civil Commissioner, Baghdad, n° 493, 6th
May 1919.
[6] Note
on the Khurma Dispute by Captain Garland with Sketch Map (App. dated 10th June
1919), 6th June 1919.
[7] Note
on the Khurma Dispute by Captain Garland with Sketch Map (App. dated 10th June
1919), 6th June 1919.
[8] Ibid.
[9] Extract
from a Confidential Diary n°1317/43/919 for the Month ending 31st Dec. 1919
from Political, Bahrein.
[10] Political,
Bahrein to Political, Baghdad, n°99 22ndJan. 1920. Political, Baghdad to
Political, Barhein, n°1018, 23rdJan. 1920.
[11] Diary
of Political Agent, Bahrein, during his recent Journey to Hasa and back.
January 30 to February 29, 1920.
[12] Tel.
R. to Political Baghdad n° H 7, 7th Feb. 1920. Transmis à Londres le 15 Février 1920 : From
Civil Commissioner, Baghdad to India Office, London n°2040. Bagdad note que le
mouvement des Ikhwan ne représentera une menace que si la politique de la
Grande-Bretagne suscite un sentiment d’hostilité dans la population et estime
qu’Ibn Saoud fait preuve de toutes les qualités nécessaires.
[13] Tel.
Cipher, from Civil Commissioner, Baghdad to India Office, London, n° 4603,
15th April 1920, Following from Bahrein. File 61-6 (D33), vol. III,
IOR/R/15/1/557.
[14] File
61-6, Extract from a Report dated March 6, 1920 by Lt-Col. Vickery, British
Agent at Jeddah.
[15] File
61/6, Letter dated 20th Mar. 1920 from Lord Allenby to the Right Honourable
Earl Curzon of Keddleston.
[16] File
61/6, Telegram P. from General Allenby, Cairo, to F.O., London, n°395, 20th
April 1920.
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